Faisons connaissance dans le moindre pli.

Si je devais me définir comme un vêtement, mon premier réflexe serait de dire : un pantalon. Après tout, je possède littéralement une vingtaine de pantalons pour seulement deux jambes. Pratique, intemporel et toujours fiable, il est mon allié au quotidien. D’ailleurs, un grand merci à Amelia Bloomer et Yves Saint Laurent d’avoir démocratisé ce vêtement pour les femmes ! Mais au final, avec mon mètre cinquante-neuf tout juste assumé, mes pantalons finissent toujours par être trop longs et je me retrouve déçue. Quelle trahison !

Donc, en y réfléchissant bien, est-ce que je ne serais pas plutôt… une robe ? C’est vrai, c’est la pièce qui me met la plus en valeur. Que ce soit pour une grande occasion, une petite, ou même sans raison particulière, je sais que je peux toujours compter sur une robe pour me faire sentir belle et confiante. Qu’elle soit longue, mi-longue, courte ou même très courte, une simple robe peut tout changer. Dès que j’en porte une, ma démarche ainsi que mon attitude se transforment complètement, rien à voir avec les jours où je cache mes jambes. Je me sens plus assurée, comme si je défilais sur un podium, sous les feux des projecteurs, prête à conquérir le monde. Soudain, dans ma tête, la musique Maneater de Nelly Furtado démarre en boucle. Je pense que mes robes préférées restent celles que je portais lors de mes compétitions de patinage artistique. Très colorées, ornées de strass Swarovski, parfois décorées de plumes pour évoquer les oiseaux quand je patinais sur les musiques du film Rio ou agrémentées de franges pour accentuer les mouvements de mes pirouettes, mes robes de patinage étaient toujours spectaculaires. J’avais la certitude d’avoir les plus belles tenues de la patinoire. Certes, je ratais parfois quelques figures, mais au moins, j’étais la mieux habillée. Et ce qui rendait ces robes encore plus spéciales, c’était qu’elles étaient confectionnées par ma maman. Elle y passait beaucoup de temps, et même si je ne l’ai pas souvent dit, j’en suis très reconnaissante. De la même manière que Charles Frederick Worth, elle a fabriqué une magnifique robe bouffante inspirée de l’impératrice Eugénie pour la semaine médiévale de mon école primaire (et m’aide également à créer les ourlets pour mes traitres pantalons beaucoup trop longs) ! Bref, les robes représentent des souvenirs précieux et une part de mon histoire. Alors, finalement, je crois bien que je suis une robe. Et pour cela, je lève mon verre à Coco Chanel, qui a su réinventer la robe telle que nous la connaissons aujourd’hui. 

Pour aller plus loin, je me qualifierais même comme une robe Simone Rocha. Des robes rose ballerine, ornées de fleurs et de nœuds, à la sensibilité hyper-féminine, à la fois coquette et rêveuse… un peu comme moi. Tantôt coquette, attachée au soin de mon apparence, quitte à frôler la superficialité aux yeux de certains. Tantôt rêveuse, parfois à l’excès. Si d’autres peuvent voir cela comme un défaut, je le considère au contraire comme une force : ma capacité à imaginer le meilleur pour demain, sans certitude que cela se réalisera, mais avec l’envie d’y croire. 

Pourtant, je ressens aussi en moi la présence de la robe-armure haute couture de Balenciaga par Demna. Une armure pour me protéger du monde extérieur, des regards et des jugements. J’ai tendance à me surprotéger, tout comme mes parents qui, en tant qu’enfant unique, ont toujours voulu me préserver. Je fais attention à ce que je dis et à ce que je fais. Je souhaite éviter tout ce qui pourrait me rendre vulnérable. Cette retenue me pousse parfois à me refermer sur moi-même, à être trop timide, à craindre le regard des autres et à hésiter avant d’aller de l’avant. Dans ces moments-là, je me sens comme la robe noire cagoule Balenciaga que Kim Kardashian a portée au Met Gala 2021. Entièrement cachée sous un voile de tissu noir opaque, à l’abri du jugement, à l’abri de la honte. Peut-être qu’ainsi moins soucieuse de ce que l’on pense de moi.  Ce paradoxe me surprend moi-même. Lors de mes compétitions de patinage, je n’avais peur de rien. J’adorais être sur le devant de la scène, affirmer qui j’étais et imposer ma présence. J’éprouvais un véritable plaisir à captiver l’attention, comme un défilé Coperni, conçu pour marquer les esprits.

Mais depuis que j’ai commencé mes études de journalisme, j’apprends à briser cette armure, à m’exposer davantage. Je vais vers les autres, je mène des interviews et des reportages, j’échange, je découvre. Ce travail sur moi-même me permet peu à peu de me libérer de mes peurs ainsi que de gagner en affirmation de soi. Dans ces moments-là, je me sens fière, comme une robe Rick Owens qui arbore fièrement ses épaulettes XXL. Une robe qui n’a pas peur de se montrer au grand jour. Et moi, petit à petit, j’apprends à en faire de même. 

Pour finir, je dirais que je ressemble à une robe haute couture Viktor & Rolf pour sa créativité et son originalité. Une robe-lit, des robes sans dessus-dessous, des robes-tableaux d’art… Qui aurait pu imaginer de telles créations aussi absurdes ? Certainement pas moi, car je n’ai pas l’imagination débordante de ce duo légendaire néerlandais. En revanche, lorsqu’il s’agit de concevoir une mise en page de magazine, d’imaginer une tenue qui sort de l’ordinaire ou encore de réaliser un projet que personne n’aurait osé avant moi, je suis toujours au rendez-vous. J’aime exploiter ma créativité dans chacun de mes domaines de prédilection, qu’il s’agisse de la mode, de la photographie, du montage vidéo ou encore de création de magazines et de portfolios.

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By ClemBodeau2023